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En juin 2000 je rentrais d'un voyage en Pologne - Patryk, mon filleul, faisait sa communion.
Maman m'annonça alors que la dépression dont elle souffrait depuis plus de dix ans s'était envolée - comme par magie. La tristesse et les idées suicidaires l'avaient définitivement et brusquement abandonnée. C'était une guérison aussi subite qu'inespérée. Le plus dur dans le malheur - le sien ou celui de ses proches - ce n'est pas seulement d'être malheureux, c'est surtout de se trouver privé de son minimum vital d'insouciance. Le malheur est désespérément sérieux. La dépression de maman venait en grande partie de la perte de son autonomie mais aussi de la désagrégation de son couple. Le langage est, dit-on, source de malentendus mais le non-dit l'est également. Face à un mari emmuré dans son mutisme, son ressentiment s'était mué, petit à petit, en haine. Et cette haine vivait en elle, au coeur de son coeur blessé.Son médecin, habile à la maïeutique, suscita en elle une réflexion sur la notion de pardon. Elle la rejeta tout d'abord avec violence avant d'en accepter l'idée. Prendre la décision de pardonner a été extrêmement difficile - et ce bien que le pardon ne soit pas synonyme d'oubli. Dans la douleur elle parvenait à la cinquième marche de cet escalier dont parle G. Cesbron. Ce cinquième échelon qui nous fait "aimer ceux qui rendent les autres malheureux".
Dieu souffre de chacune de nos souffrances. Il n'attend, peut-être, de nous qu'un signe de bonne volonté pour nous témoigner Son amour. Mais, ce choix nous sommes seuls à pouvoir le faire. Ce si difficile pardon, maman l'accorda à papa alors qu'elle croyait son coeur sans capacité de pardon envers celui qui l'avait blessée.
Seul le Docteur Ph R-M sait combien ce pardon fut dur à donner. Maman lui est extrêmement reconnaissante de l'avoir exhortée à faire cette démarche. En lui communiquant sa foi dans le pouvoir du pardon, il l'a grandie.
LA REPONSE DE DIEU
Quelques mois plus tard vînt le soir miraculeux. C’était le 20 octobre 2000. Le médecin Ph. R.-M. était à la maison pour une énième visite. Ce soir-là il se trouvait auprès d’elle dans la chambre. Maman était allongée sur le lit. Tout à coup il se saisit de son bras gauche et lui fit faire des mouvements. Ma mère savait qu’il était à ses côtés, elle entendait sa voix, mais un « écran » l’empêchait de le voir distinctement. Elle ne parvenait pas à faire le moindre mouvement, quand soudain cela lui a été possible – sans douleur et avec une extraordinaire facilité. C’est à ce moment précis qu’elle vit, l’espace de quelques secondes, l’intérieur de son épaule empli d’une très belle lumière dorée.
STUPEUR ET BEAUTE – ces mots qui forment un titre à la Jane Austin traduisent la réalité qui s’est tout de suite imprimée en elle. Elle ressentit alors une joie infinie et entendit le docteur prononcer cette courte phrase : « ça y est ».
De même qu’Henry James dit à son amie Edith Warthon : « vous agissez directement au nom du Tout-Puissant en ranimant en moi l’étincelle vitale ».De même maman dit à son médecin : « vous êtes celui que Dieu a choisi pour me guérir ».
Quelques jours plus tard, maman constata que son omoplate gauche – jusqu’alors rentrée au point d’être devenue indiscernable – saillait à nouveau ! Outre le préjudice esthétique visible, cette déformation ajoutait à la gêne fonctionnelle.Retrouver son autonomie perdue depuis tant d’années, bouger, vivre à nouveau pleinement ! Seul celui qui a souffert comprend le prix d’une telle renaissance.
Pendant toutes ces années de souffrances et de profonde détresse, durant ces longues périodes d’alitement, maman eut un petit compagnon à quatre pattes qui lui fut fidèle jusqu’à sa disparition en octobre 2001.Cette boule de poils avait fait irruption dans notre vie en 1989. La présence constante et affectueuse de cette petite personne animale a été magnifique, à l’instar d’une affection humaine.
« Tessy » est désormais devenu pour nous un doux souvenir, un tendre regret… Il a sa place dans cette belle histoire. Ne dit-on pas, en effet, que « Dieu pèse dans la pierre, pousse dans la plante, respire dans l’animal, aime dans l’homme ».Quelques jours avant Noêl, le 21/12/2001 « Lola » nous est tombé du ciel, comme un cadeau… Petite siamoise irrégulière, jetée quelque part dans les Yvelines…Recueillie, soignée par des amis des animaux, elle fait depuis lors notre bonheur. La contempler est une joie simple, chaque jour renouvellée.
En 2001 maman prit rendez-vous avec le chirurgien qui l’avait opérée sept ans auparavant. Il constata, à son grand étonnement, que l’épaule gauche était « subnormale » sans qu’il puisse médicalement l’expliquer.
Dieu se manifeste là où Il veut et quand Il le veut. Maman ne s’explique toutefois pas Sa visite dans son modeste quotidien. Jamais le soupçon qu’elle serait digne d’une telle grâce ne l’avait effleurée. Elle se sent l'élue d'un choix qui la dépasse. D'autant plus qu'elle n'a jamais prié. Cette guérison que Dieu a voulue et qui déroute la raison humaine - comme toute intervention surnaturelle - a transfiguré son existence. Aussi souhaite-t-elle faire partager cette joie qui désormais l'habite. Elle désire ardemment tenir la promesse qu'elle a faite à Dieu - promesse de s'engager à témoigner pour donner une raison d'espérer à ceux qui doutent, souffrent et se désespèrent.
S'il est vrai que "Dieu ne peut être présent dans la Création que sous la forme de l'absence" comme l'affirme S. Weil, Il nous permet parfois de Le rencontrer à travers certaines personnes. Jean-Marie Pelt dit d'ailleurs qu' "il existe une magie de la rencontre par quoi le divin parfois se révèle." Il poursuit en disant: "chaque être est un autographe de Dieu. Et il nous arrive d'en percevoir le reflet au détour d'une rencontre ou d'une attitude fortuite, d'un geste ou d'un mot émanant d'un être cher. brusquement c'est Dieu lui-même qui s'invite et qui est là. Un ange passe. Et nous nous recueillons en silence, émerveillés d'avoir entrevu dans l'autre le Tout-Autre." (Le jardin de l'âme)
Le Père Stan Rougier a écrit dans son livre "Quand l'amour se fait homme" que "notre avenir éternel se joue dans le quotidien le plus banal. Au soir de notre vie, il ne nous sera pas demandé: "combien as-tu gagné d'argent?". "Combien as-tu écrit de livres?". " As-tu eu ton nom dans les journaux?". " Es-tu passé à la télévision?".Au soir de notre vie, il nous sera seulement demandé: "qu'as-tu fais de ce coeur que je t'avais donné pour aider tes frères à vivre?". "Qu'as-tu fais de ce coeur que je t'avais confié pour apprendre à aimer?". "De qui as-tu guéri la blessure?".
Aider à vivre ceux qui souffrent, les aider à garder l'espoir, c'est la raison d'être de ce témoignage.ésus demande à ses apôtres:"Ce que je vous dis dans l'ombre, dites-le au grand jour,ce que vous entendez dans le creux de l'oreille, proclamez-le sur les toits. Ne craignez pas..."